Le pseudonymat sur Internet

Par Marie BASTIAN et Justine PATE-KOENIG

Le pseudonymat sur Internet – Défense et dérives du droit à l’anonymat sur Internet 

La divinité romaine Janus se serait probablement délectée de nos identités fragmentées que l’ère numérique ne cesse d’accoucher sur la Toile. Ce dieu à une tête mais deux visages incarnait dans la mythologie romaine un rôle pivot crucial, celui du changement et de la transition. Baptisé « Dieu des Portes », et invoqué comme tel, il était celui qui ouvrait et fermait des cycles selon sa volonté divine. A tel point qu’il est devenu par la suite dans l’imagerie populaire, celui qui varie au gré de ses intérêts et ses envies en alternant un visage ou l’autre. Or, sur les réseaux sociaux, la tentation de s’abriter ou de se façonner une autre construction de soi est justement devenue monnaie courante.

L’anonymat est l’état d’une chose ou d’une personne dont on ne connait pas le nom, l’auteur, le responsable voire qui est inconnu.

Le droit à l’anonymat est nécessaire pour éviter toute dérive à la Big Brother pour les uns mais qui ouvre la voie de la criminalité et aux attaques personnelles en ligne pour d’autres.

L’ère informatique n’est pas celle de l’invention de la polémique, ni de la controverse. Les premiers conflits d’opinion remontent aux racines de l’humanité, de la parole et de l’écriture. Sans doute l’homme de Cro-Magnon argumentait-il déjà avec son voisin immédiat pour savoir si le mammouth qui allait orner leur grotte devait être fait d’ocre ou d’argile. Puis, peu après, est venue la politique, et avec elle les premiers clivages : qui voudrait établir l’inventaire des conflits relatifs à cette dernière dans l’histoire de l’humanité devrait vivre plusieurs siècles pour mener à bien sa tâche.

La communication entre les hommes s’est faite sur des forums, des places publiques, des agoras. Elle s’est dite dans le secret des maisons, dans le murmure des correspondances, dans l’ivresse des manifestations, mais toujours avec la caution d’un visage ou d’un nom, celui du destinataire de nos paroles.

Internet a changé les normes anciennes de la communication. Les universitaires KIESLER, SIEGEL et MCGUIRE, en 1984, ont fait de la communication numérique leur champ d’études, et en ont déduit que la relative absence d’éléments non-verbaux, tels que le ton de la vois, les mimiques ou la gestuelle accroissaient de fait des comportements désinhibés, agressifs et anti-normatifs. Tel citoyen affable et poli pourra donc se métamorphoser en goujat en puissance dès lors qu’il sera protégé par un pseudonyme, pseudonyme qui lui confère l’illusion d’une liberté de parole absolue…et illusoire. En effet, Internet n’est pas une zone de non-droit, et quiconque par lui verse dans la calomnie est passible de sanctions.

Lors de la publication de ses premiers comptes trimestriels suite à son introduction en Bourse, Facebook a révélé d’étonnantes statistiques. D’après ses calculs le réseau social de Mark Zuckerberg dénombre 83 millions de faux comptes soit 8,7% des profils enregistrés aujourd’hui sur Facebook ? Dans ce décompte, on distingue des comptes doubles (qui équivalent à 4,8%), des comptes mal classifiés (2,4%) et des comptes purement assimilés à du spam (1,5%).

L’anonymat numérique est toujours utile, et il l’est même plus que jamais. Mais encore faut-il savoir de quoi on parle. L’anonymat sur le web n’est pas le fait de ne pas signer ses propos tel un vulgaire corbeau. L’anonymat sur le web est un pseudonymat, le fait de signer d’une identité qu’on s’est choisi, qui individualise les écrits et en identifient l’auteur.

Sommes-nous tous des ambivalents en puissance ?

I. Des mots doux aux maux durs…

A) Le pseudonymat comme moyen de libérer la parole.

1.    L’antagonisme vie réelle / vie virtuelle.

2.    L’anonymat, une utopie impossible ?

3.    Illustrations des dangers justifiant l’utilité globale de l’anonymat dans la société numérique.

B) Les bases légales de l’anonymat.

1.    Le point de vue de la Cour Européenne des Droits de l’Homme : arrêt Delfi As c. Estonie.

2.    La situation juridique de l’anonymat en France : la proposition de loi MASSON.

3.    L’exemple allemand.

II. Devons-nous tous être des Janus numérique ?

A) L’anonymat sur Internet, porte ouverte aux dérives.

1.   La métamorphose identitaire exaltée par les médias sociaux.

2.    Les dérives de la blogosphère.

B) Quid d’un hétéronymat ?

1.    La solution KASPERSKY, ou l’anti-hétéronymat: le passeport virtuel.

2.    Anonymat ou hétéronymat : deux approches de la confidentialité.

Pour en savoir plus : exposé Le pseudonymat sur Internet

Sarah ABDELMALEK

Présidente de l’association du Master 2 Droit des nouvelles technologies et société de l’information – promotion 2014.